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Un futur sans chaîne pour le vélo?
par Michael Restin
D’abord la technologie électrique, ensuite les améliorations : l’équipementier automobile Schaeffler construit actuellement une transmission électrique pour les vélos qui ne nécessite ni chaîne ni courroie. À défaut d’être très esthétique, cette invention est résolument tournée vers l’avenir.
La mécanique, ça déchire : grâce à cette dernière, nous pouvons observer et comprendre le fonctionnement du monde. Lorsque la chaîne du vélo se tend sous l’effet de la pression exercée sur la pédale et que votre puissance est transférée à la roue, le processus s’avère tout simple, mais d’une efficacité redoutable, avec une efficacité énergétique pouvant atteindre 98 %. Mais la chaîne constitue aussi une pièce d’usure qui limite les possibilités de conception. À l’heure actuelle, de nombreux (e-)vélos innovent dans ce domaine.
Si Schaeffler Groupe parvient à ses fins, les vélos de transport et les camionnettes à pédales du futur seront libérés de la chaîne classique. Un entraînement par courroie ne sera plus non plus nécessaire. L’équipementier automobile et industriel a mis au point le système « Free Drive » en collaboration avec les spécialistes de l’entraînement de Heinzmann GmbH. Lorsque vous pédalez, vous alimentez un générateur qui transmet l’énergie électrique au moteur du moyeu de la roue. Elle y est ensuite reconvertie en énergie mécanique. Vous ne faites donc que pédaler pour générer une puissance supplémentaire, tandis que le système tente de vous donner l’impression que vous contribuez quand même un peu au mouvement de votre vélo. Si vous pédalez plus fort, il accélère en conséquence, bien qu’aucune connexion mécanique, comme une chaîne, ne l’y oblige.
Le progrès se fiche bien de la nostalgie : si une solution électronique présente des avantages par rapport à la solution mécanique dans certaines situations, c’est bien au niveau de la chaîne. C’est la fin radicale d’une « histoire d’amour » avec le vélo. Le nouvel ensemble s’appelle système « commandes de vélo électriques », terme emprunté aux commandes de vol électriques de l’aviation, où les signaux de commande sont envoyés aux gouvernes de manière similaire, et où des ordinateurs déterminent en partie la manœuvre autorisée. Les avions disposent bien sûr toujours de systèmes de sécurités multiples et parfois mécaniques pour de bonnes raisons. Avec le système « commandes de vélo électriques », une panne ne conduirait pas directement à une catastrophe, mais à fin abrupte du voyage.
Ces problèmes devraient être très rares. Schaeffler explique que le système fermé se distingue par une faible usure, ce qui permet une réduction des coûts de maintenance et d’exploitation. Concrètement, cela signifie moins de composants mécaniques à remplacer régulièrement. Les entreprises de livraison et de location pourraient faire des économies et mieux adapter la conception des véhicules à leurs besoins. Envoyer l’électricité vers les roues motrices s’avère loin d’être aussi compliqué qu’une solution mécanique et pourrait constituer une solution d’avenir : les arguments écologiques parlent en tout cas en faveur de cette invention. Quant à savoir si elle procure autant de plaisir en vélo que la bonne vieille chaîne, c’est une autre question.
La seule question reste de savoir pourquoi vous devez encore pédaler pour alimenter une « interface personne-machine » avec votre énergie. Vous n’irez pas plus vite que ce que l’entraînement du vélo permet : vous ne bénéficiez en effet plus d’une chaîne pour faire tourner la roue directement et ainsi augmenter votre vitesse. Vous êtes juste le générateur de secours du moteur, qui fournit actuellement 250 watts de puissance continue. On a plus l’impression d’être sur un ergomètre (appareil de fitness) que sur un véritable vélo. J’ai une idée de nom pour cette invention : « roue pour hamster ». En effet, un tel vélo que vous ne contribuez qu’indirectement à avancer procure le même effet.
Les livreurs ne souffrent en général pas d’un manque d’exercice et pourraient parcourir les distances porte-à-porte sans pédaler. Les concepteurs affirment que la « sensation de pédale librement configurable » s’adapte aux besoins de chacun. « Free Drive » peut être paramétrée de manière différente selon le véhicule, l’utilisateur et les préférences. Ces possibilités sont évidemment utiles. Le système ne se destine en revanche pas aux sportifs ambitieux, mais dans ce domaine aussi, une conception sans chaîne se trouve dans les starting-blocks depuis un certain temps : la société CeramicSpeed recherche actuellement des investisseurs afin de pouvoir développer un produit dans ce secteur.
Ces deux idées n’enverront néanmoins probablement pas la bonne vieille chaîne en maison de retraite. Elles la compléteront tout au plus à un moment donné. Techniquement, difficile de nier la valeur ajoutée de « Free Drive ». Si l’électronique entre en jeu, la magie de la bicyclette disparaît, mais peut-être qu’à long terme, de nouvelles façons passionnantes de faire du vélo, non seulement pratiques, mais aussi esthétiques, verront le jour.
Les croquis fantaisistes présentés dans l’article ci-dessous montrent ce qu’il est possible de faire au niveau du design lorsque l’on n’a pas à se soucier d’un mécanisme fonctionnel. Néanmoins, les gens ont oublié de dessiner une bicyclette classique... Ils ont par contre déclenché une réaction artistique en chaîne. Peut-être que l’avenir sera non seulement pratique, mais aussi esthétique, avec ou sans chaîne.
Photo de couverture : SchaefflerÉcrivain amateur et père de deux enfants, j’aime être en mouvement et avancer en équilibre sur le chemin sinueux de la vie de famille. Je jongle avec plusieurs balles et il m’arrive parfois d’en faire tomber une. Il peut s’agir d’une balle, ou d’une remarque. Ou des deux.