Über Hannah Arendt

Judith N. Shklar a passé sa vie à étudier Hannah Arendt. Dans ses textes, elle dresse un portrait ambivalent de la philosophe, de 22 ans son aînée, et revient sans cesse sur elle dans son œuvre, tantôt avec reconnaissance, tantôt avec humour et acuité polémique. Shklar apprécie surtout Arendt pour ses réflexions sur l'exil et l'apatridie et pour une éthique qui tient en haute estime la promesse de la politique et d'un nouveau départ absolu possible à tout moment. Mais en même temps, Shklar la critique comme une métaphysicienne prétentieuse et une marxiste déçue avec un penchant pour le romantisme politique. "Sur la révolution" est pour Shklar un "livre embarrassant", tandis que "Arendt dans Eichmann à Jérusalem" ne sait réfléchir à la politique que de manière "épigonale et amateur", avec l'arrogance du paria autoproclamé. Contre la compréhension héroïque de la politique d'Arendt et son aveuglement face aux injustices historiques, Shklar fait l'éloge d'un procéduralisme impersonnel et de son propre libéralisme de la peur et des droits - c'est ainsi que l'œuvre de Shklar s'est notamment construite contre la pensée d'Arendt. Grâce aux textes rassemblés ici, il est désormais possible de retracer la relation entre deux théoriciennes politiques centrales du XXe siècle.